L. MONNNIER, C. COLETTE, Laboratoire de Nutrition Humaine et Athérogenèse, Institut Universitaire de recherche Clinique, Montpellier
Compte tenu de ces observations, notre propos était à l’époque de dire que la niacine avait fort peu de chance d’être commercialisée en France et ce, d’autant plus que les fibrates venaient d’être introduits sur le marché français dans les années 1975.
Les temps ont changé, les médicaments aussi. Aujourd’hui le laboratoire Merck Lipha propose une forme modifiée et retard de la niacine : Niaspan® LP. Ce médicament peut être utilisé à des doses ≤ 2 g/j et donc beaucoup plus faibles que celles préconisées pour la niacine libre. À ces doses, le produit retard ne présente pas d’hépatotoxicité, mais il garde toutes les propriétés hypotriglycéridémiantes du produit original. En revanche, les épisodes de flush au visage sont toujours présents même s’ils sont moins fréquents et ne sont ressentis que par 10 à 15 % des sujets traités.
La niacine possède un mécanisme d’action original (figure). Elle diminue la lipolyse adipocytaire et freine l’estérification hépatique du glycérol par les acides gras. Cette action lui confère un effet hypotriglycéridémiant variant entre 25 et 35 % selon les études. Son action sur le métabolisme du cholestérol n’est pas négligeable. Elle est caractérisée par une diminution du LDL-cholestérol, mais surtout, par une augmentation du HDL-cholestérol qui varie selon les études de 18 à 43 %.
La niacine est donc un traitement intéressant chez tous les sujets ayant une hypertriglycéridémie pure ou une hyperlipidémie combinée (augmentation des triglycérides et du cholestérol total) associée à une diminution du HDL-cholestérol. Ces dyslipidémies, caractéristiques du syndrome métabolique et au-delà du diabète sucré de type 2, sont donc l’indication privilégiée de Niaspan® LP, lorsqu’elles résistent aux thérapeutiques classiques qui restent fondées en première intention sur une prise en charge nutritionnelle ou sur une amélioration de l’équilibre glycémique, si le sujet est diabétique. En effet, ces dyslipidémies sont en général diéto- ou diabéto-dépendantes, les mesures diététiques étant la restriction calorique, la suppression des boissons alcooliques et le contrôle des apports en glucides dits « rapides ».
Lorsque Niaspan® LP est utilisé, le traitement doit être prescrit à doses progressives en partant de doses modestes (375 mg/j) et en augmentant le traitement lentement pour atteindre la dose thérapeutique qui peut aller jusqu’à 2 g/j. Ainsi, la niacine, traitement du passé, est redevenue une thérapeutique d’avenir avec l’introduction de Niaspan® LP dans la pharmacopée française. Pour résumer et conclure notre propos, « Back to the future » pourrait être sa devise.
Figure. Mécanisme d'action simplifié de la niacine (acide nicotinique) sur le métabolisme des triglycérides et du HDL-cholestérol.