Publié le 31 mar 2007Lecture 4 min
Le droit du travail : l’embauche
B. GUERCI CHU Nancy, Hôpital Jeanne d’Arc
Une des interrogations des patients diabétiques concerne l’accès à un emploi : « Dois-je informer mon employeur de mon état diabétique lors d’une visite d’embauche ? » À cette question, la réponse est apparemment simple : quel que soit le poste et l’emploi que le patient va occuper, ce dernier n’est absolument pas tenu d’en informer son employeur, que ce soit oralement ou sur un questionnaire d’embauche.
Seul le médecin du travail sera habilité à juger de l’aptitude de la personne au poste de travail. Cette information concerne l’état de santé du patient : elle est par conséquent confidentielle et ne doit être divulguée qu’à un personnel soumis au secret professionnel.
La loi n° 90-602 du 12 juillet 1990 stipule clairement que : « la protection accordée aux personnes contre les discriminations dont elles pourraient être victimes en raison de leur origine, de leur sexe, de leurs mœurs, de leur situation de famille ou encore de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, est étendue aux discriminations dont elles pourraient être l’objet en raison de leur état de santé ou de leur handicap ». Dans la pratique, l’image de la maladie diabétique est mauvaise, et y sont arbitrairement associées : arrêts de travail répétés, absentéisme, faible rentabilité, nécessité d’aménagement de poste de travail ou encore risque inhérent aux hypoglycémies, etc.
Dans la fonction publique
En théorie, l’accès aux postes de la fonction publique ne pose pas de problème aux personnes diabétiques. La circulaire 1-48 du 14 octobre 1968, précise les termes de l’ordonnance de 1959, à savoir : « Ni les règles générales de l’article, ni les dispositions du décret... ne permettent de considérer le diabète comme une affection incompatible, d’une manière générale et absolue, avec l’exercice normal d’un emploi public ». Cependant, toute intégration est soumise à l’approbation d’un Comité médical qui peut décider et conclure à une inaptitude au travail.
En cas de refus d’embauche, le patient ne doit pas hésiter à faire appel, à demander le motif exact du refus d’embauche, et le cas échéant à le contester. Dans cette situation, le recours à l’avis du spécialiste diabétologue en complément de celui du médecin traitant est toujours très utile sous forme d’un certificat médical.
Dans le secteur privé
Un employeur ne peut pas refuser un emploi sur le fait que le candidat est diabétique dès lors qu’il a les compétences requises pour ce travail. Mais, l’employeur n’a pas à justifier les raisons de son refus, et il est souvent impossible de prouver qu’une personne n’a pas été retenue à cause de son état de santé.
C’est la raison pour laquelle, les personnes diabétiques se doivent d’être particulièrement prudentes lors des entretiens d’embauche. Les questionnaires comportent le plus souvent autant d’informations administratives que de questions privées d’ordre social, culturel ou médical. C’est une des raisons qui doit amener le patient diabétique à présenter la carte cryptée « sésame vitale » (qui ne contient que des données administratives) pour renseigner son numéro national d’identité. En effet, fournir la carte d’assuré social consiste à s’exposer à des questions relatives à la mention : « prise en charge à 100 % ». Il est toujours possible de réclamer auprès des caisses d’assurance maladie un double de la carte d’assuré social ne comportant que les informations administratives.
C’est le médecin du travail qui, lors de la visite d’embauche, mais également lors de visites annuelles ou de reprise du travail après un arrêt maladie, déclarera l’aptitude au travail du sujet. Il est tenu au secret professionnel vis-à-vis de l’employeur.
Le diabétologue joue souvent un rôle crucial dans des situations litigieuses, en rédigeant en accord et à la demande du patient, un certificat détaillé précisant l’état de santé ainsi que le traitement prescrit en rapport avec la compatibilité pour tel ou tel travail du point de vue du spécialiste.
Quand la maladie évolue
Au cours de sa vie professionnelle, la question de l’aptitude au travail peut à nouveau se poser en fonction de l’évolution de la maladie diabétique et de l’apparition d’éventuelles complications dégénératives.
C’est encore au médecin du travail de se prononcer, et le diabétologue peut à nouveau intervenir afin de renseigner et d’éclairer le médecin du travail dans ses conclusions. À l’issue de la visite médicale, le médecin du travail peut prononcer une inaptitude partielle avec réserve, temporaire ou définitive. Il en informe l’employeur sans préciser les raisons médicales de l’inaptitude.
Plusieurs cas de figure se présentent alors :
– soit un reclassement dans l’entreprise ou un aménagement du poste de travail (parfois associé à un salaire plus bas) est envisageable ;
– soit un licenciement pour inaptitude est prononcé si aucune des solutions précédentes n’est applicable. Ce licenciement, s’il a lieu, ne donne droit à aucune pension car il ne s’agit pas d’une inaptitude générale au travail, mais seulement une inaptitude au poste qu’occupait la personne diabétique. En revanche, un licenciement fondé sur des discriminations médicales sans rapport avec la réelle aptitude du salarié au travail est considéré comme nul au regard de la loi, et peut aboutir à la réintégration du salarié dans l’entreprise (en pratique rarement observée) et/ou à l’attribution de dommages et intérêts.
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