Publié le 31 aoû 2011Lecture 6 min
Quelles alternatives à l’intensification de l’insuline quand une basale ne suffit pas ?
H. JOUBERT
SFD
Un cas clinique a servi de prétexte aux arguments scientifiques présentés en faveur des différentes stratégies d’intensification, associant les insulines et les antidiabétiques oraux selon les valeurs de l’HbA1c, de la glycémie à jeun et de la glycémie postprandiale.
Ce patient âgé de 65 ans a un diabète connu depuis 9 ans, avec une HbA1c à 8,5 %, un IMC à 30 kg/m2. Il a perdu 3 kg au cours des 6 derniers mois, et est traité par une bithérapie metformine + gliclazide. Il n’a pas d’antécédent de complication cardiovasculaire mais il est porteur d’une rétinopathie débutante et d’une microalbuminurie.
A ce stade de la maladie, l’objectif est de ramener son HbA1c aux alentours de < 7 % pour limiter la progression de sa microangiopathie et aussi prévenir les complications cardiovasculaires. Considérant la durée d’évolution moyenne du diabète et l’objectif, il est décidé d’introduire une insuline basale chez ce patient en échec de bithérapie.
La poursuite du traitement oral par metformine est justifiée pour limiter la prise de poids. En outre, la metformine a démontré son intérêt en termes de mortalité totale et cardiovasculaire (étude REACH), et pour diminuer le risque de mortalité par cancer en association à l’insuline. Comparativement à une sulfonylurée, le risque d’insuffisance cardiaque est moindre. Cette dernière est donc arrêtée.
Six mois après la mise en route de l’insulinothérapie basale, ce patient est sous 35 U/j d’insuline glargine et 2 g de metformine, avec pour bilan une HbA1c à 8,5 % et une glycémie à jeun à 1,6 g/l. Il n’a pas d’hypoglycémies mais il a pris 3 kg depuis les 6 derniers mois. Ce patient est-il au stade où une basale ne suffit plus ?
On peut estimer que l’objectif est une glycémie à jeun < 1,20 g/l. La corrélation entre la cible d’HbA1c et l’objectif de la glycémie à jeun est très étroite. L’obtention d’une HbA1c < 7 % impose d’adapter l’insuline basale jusqu’à atteindre une glycémie à jeun (GAJ) < 1,0 g/l1. Afin de limiter le risque d’hypoglycémies, les objectifs ont été revus en légère hausse avec un objectif pour la GAJ de 1,20 g/l. C’est la titration, efficace, de l’insuline basale qui permettra un gain significatif vis-à-vis de l’HbA1c.
Dans une étude récente2, les doses à l’inclusion d’insuline basale du groupe placebo (insuline glargine seule) étaient de 0,50 U/j. La titration à 0,71 U/kg a permis de ramener la GAJ de 1,50 g/l à 1,15 g/l rien qu’en titrant l’insuline basale, avec à la clé un point d’HbA1c en moins (8,41 à 7,41 %).
Six mois se sont écoulés. La dose d’insuline a été augmentée à 50 U/j, avec des GAJ des 3 derniers jours à 0,8, 1,2 et 1,1 g/l. L’HbA1c stagne à 7,5 % et ce patient a pris 2 kg de plus. Ce patient est-il au stade où une basale ne suffit plus ?
Lorsque la GAJ se situe à l’objectif (< 1,20 g/l) mais que l’HbA1c est ≥ 7 %, on est effectivement au stade où l’insuline basale ne suffit plus. L’étape suivante est de s’intéresser aux glycémies postprandiales (GPP), en considérant que plus le taux d’HbA1c s’approche de l’objectif, plus la part de la GPP est importante. C’est la valeur du petit déjeuner qui est la plus élevée de la journée et ce, quel que soit le niveau d’HbA1c3.
À ce stade, plusieurs options sont envisageables, la première étant l’insulinothérapie fractionnée.
La HAS en 2006 réservait le basal-bolus avec 4 à 6 injections (1-2 d’analogue lent et 2-3, voire plus, de rapide) aux patients DT2 devenus insulinoprives, non âgés et compliants. Des schémas plus simples utilisant des Premix sont aussi proposés à 2-3 injections, avec quelques limites cependant pour adapter séparément les doses d’analogues rapides et d’insuline intermédiaire.
L’étude observationnelle IMPROVE4 a montré que l’HbA1c s’améliore en intensifiant l’insulinothérapie en swichant d’une basale à 2 injections de Premix, avec pour toutes les insulines de départ utilisées, 39 % de patients qui atteignent par ce moyen l’objectif < 7 % d’HbA1c. L’étude PREFER5 a étudié l’autre option d’intensification, le schéma basal-bolus, qui s’avère un peu plus efficace sur l’HbA1c, mais au prix de plus fortes doses d’insuline et d’un risque majoré d’hypoglycémies. Pour cette raison, il est à réserver aux diabétiques autonomes.
Outre l’insulinothérapie fractionnée, pour intensifier le traitement et agir sur la GPP, et du même coup sur l’HbA1c, on dispose de nombreuses autres armes, tels l’acarbose, les glinides, les analogues du GLP-1 et les inhibiteurs des DPP-4.
Les incrétines agissent en postprandial
L’adjonction de sitagliptine à un traitement par insuline, avec ou sans metformine, a été étudiée6, chez des diabétiques de type 2 (DT2) mal équilibrés (HbA1c : 8,6 % en moyenne), de plus de 12 ans d’ancienneté de diabète, avec une GAJ de 1,80 g/l en moyenne, une GPP à près de 3 g/l et un IMC de 31,4 kg/m2. Le résultat sur le critère principal, à savoir l’amélioration de l’HbA1c, est significatif, avec un gain de 0,6 % d’HbA1c (p < 0,001) sur 24 semaines. L’ajout de la sitagliptine à une insuline basale ou à un Premix améliore donc l’hémoglobine glyquée. Ce gain est légèrement supérieur mais non significatif si la metformine est maintenue (-0,66 % vs - 0,55 %). Comme attendu, le bénéfice sur la GAJ est moindre que celui obtenu sur la GPP (-30,9 vs -18,5 % ; p < 0,001). La réduction de 0,6 % d’HbA1c a été obtenue sans prise de poids, que les patients soient traités ou non par metformine.
Une étude chez des diabétiques de type 2 sous insuline glargine (titration autorisée) et metformine, randomisés en trois bras sous exénatide, sitagliptine ou placebo a montré après 4 ans de suivi que l’exénatide et la sitagliptine en ajout à la metformine et à l’insuline ont un effet additionnel similaire en termes de la réduction de l’excursion glycémique postprandiale7. Avec le bémol d’un faible effectif (n = 15 dans chaque groupe), les désordres gastro-intestinaux ont été plus fréquents dans le groupe exénatide (28 %).
Enfin, l’exénatide en add-on de la glargine infléchit l’HbA1c de près de 2 points et cet effet se maintient au long cours, avec un effet bénéfique similaire sur la GPP2, avec un bénéfice additionnel en termes de diminution des doses de glargine lorsque les patients prenaient de l’exénatide. La PAS/PAD s’est abaissée avec un écart de 4,4/3,3 mmHg comparativement au placebo et les patients ont perdu environ 2 kg avec des inconvénients néanmoins de tolérance digestive (nausées : 41 vs 8 % ; diarrhées : 18 % vs 8 %).
La prescription d’un inhibiteur de DPP-4 a pour avantages sa facilité de prescription, l’absence de titration et de surveillance, hormis celle de la glycémie, sa bonne tolérance (pas d’hypoglycémies, en l’absence de sulfamide associé, pas d’œdèmes, effet pondéral favorable) et son efficacité, même à un stade avancé du diabète où l’on considère que l’insulinosécrétion n’est plus stimulable, ce qui reste encore à prouver. Cette efficacité s’explique par l’absence de déficit en GLP-1. Seule la sitagliptine possède l’AMM en association avec l’insuline, toutefois non remboursée dans cette indication.
Quelques mois plus tard, le patient est parvenu à des doses de 0,6-0,8 U/kg /j d’insuline basale. La prise de poids est importante, la GAJ non contrôlée. On peut parler d’échec de l’insulinothérapie basale.
La pompe à insuline peut s’avérer dans ce cas très utile, avec des gains observés dans la littérature allant jusqu’à 1,5 point d’HbA1c. Une stratégie de réduction pondérale doit être instituée.
Symposium des laboratoires MSD, Congrès de la Société francophone du diabète (SFD), Genève 2011.
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