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Insuline

Publié le 15 jan 2025Lecture 7 min

Délivrance automatisée d’insuline et activité physique : regards croisés (1re partie)

Laurent MEYER, service d’endocrinologie-diabétologie-nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg Hôpital de Hautepierre, Strasbourg

L’OMS préconise la pratique d’une activité physique (AP) régulière pour toute personne adulte(1) et, en l’absence de contre-indication, pour les patients atteints d’une maladie chronique. Cette préconisation est généralement délivrée aux patients vivant avec un diabète, en particulier de type 1 puisque la pratique d’une activité sportive est moins fréquente dans cette population. Le sport (ou l’activité sportive) est une forme particulière d’AP ou les participants adhérent à un ensemble commun de règles et d’objectifs bien définis. La pratique sportive comprend le sport de haut niveau (en compétition) et la pratique sportive en club, le sport scolaire et les pratiques sportives de loisirs, en individuel ou en groupe. Les activités sportives les plus populaires en France sont actuellement la marche nordique, la natation, le cyclisme et la course à pied.

La question de l’utilisation optimale d’un système de délivrance automatisée de l’insuline (DAI) chez un sujet vivant avec un diabète de type 1 pratiquant régulièrement une activité physique, c’est-à-dire de façon pluri-hebdomadaire, est fréquente dans notre pratique clinique. Cependant, cette gestion de l’activité physique avec un système de DAI reste un point délicat et de nombreuses études ont été récemment publiées pour tenter d’améliorer cette gestion. La plupart de ces travaux sont expérimentaux et concernent différents types de protocoles sur une période et un type d’activité très standardisés(2,3). S’il peut être tentant d’adapter les conseils en fonction du caractère aérobie, anaérobie ou mixte de l’activité, la durée et l’intensité de celle-ci et d’autres facteurs environnementaux pas toujours bien identifiés ainsi qu’une variabilité glycémique interindividuelle importante rendent la tâche moins facile qu’il n’y paraît. Quelles sont les recommandations actuelles des sociétés savantes ? Quelles sont les recommandations actuelles des fabricants ? Quelles sont les pratiques des diabétologues cliniciens ? Finalement que font réellement les patients ? Essayons d’y voir un peu plus clair.   Que suggèrent les données récentes de la recherche clinique sur DAI et activité physique ?   Au cours des 3 dernières années plusieurs travaux concernant l’utilisation de différents systèmes de DAI en situation d’activité physique régulière ont été publiés. En 2021, un travail français a montré des résultats positifs avec le système Diabeloop Generation-1 (DBLG1)(4). Une analyse post-hoc de l’essai contrôlé randomisé multicentrique Diabeloop WP7 a en effet été réalisée afin d’étudier l’efficacité du système dans le contrôle de l’hypoglycémie induite par l’activité physique (AP) dans des conditions réelles. Le temps passé dans la plage sous la cible < 70 mg/dL n’était pas significativement différent entre les jours avec et sans AP, quelle que soit l’intensité ou la durée de l’AP. L’apport préventif de glucides recommandé par le système était significativement plus élevé pendant les jours d’AP, et l’administration d’insuline était significativement plus faible. La même année, un cas clinique était publié, montrant l’efficacité d’un autre système de DAI tout juste commercialisé, au cours d’un semi-marathon en compétition(5). Depuis, plusieurs travaux similaires ont montré tout l’intérêt d’utiliser un système de DAI en cas d’activité physique régulière et un article de synthèse sur le sujet a été publié très récemment(2).   Que disent les recommandations récentes des sociétés savantes ?   Très récemment a été publiée l’actualisation de la prise de position des experts français sur l’insulinothérapie automatisée en boucle fermée(6), travail coordonné par P.-Y. Benhamou, H. Hanaire et N. Tubiana-Rufi au nom de la SFD (Groupe de travail Télémédecine et Technologies Innovantes de la SFD), SFD paramédical, SFE, SFEDP, AJD, FFD, FENAREDIAM et CNP-EDDM. Dans cette actualisation très détaillée, le sujet de l’activité physique et de sa gestion pratique a été abordé. Les recommandations de l’utilisation de la BF ont précisé qu’il restait très important de réduire le bolus du repas précédent si l’activité était prévue dans les 4 h suivantes, qu’il était capital d’activer les modes « exercices » des systèmes de BF au minimum 2 h (ou plus si possible) avant afin de réduire la quantité d’insuline active. La gestion des resucrages est également modifiée : il est conseillé de réaliser le resucrage pré-activité juste au moment du démarrage et pas 30 min avant afin d’éviter l’hyperglycémie et donc une correction excessive. De même, les autres resucrages doivent être réduits (< 10 g) afin de limiter toute hyperglycémie, quitte à les répéter plus souvent pour maintenir la glycémie stable. Les modes « activité » sont différents en fonction des systèmes mais la majorité augmentent l’objectif glycémique autour de 150 mg/dL en réduisant l’insuline. Pour des activités d’endurance prolongée, ces modes peuvent s’avérer insuffisants et justifier l’arrêt de la régulation automatique ou le choix d’un système avec possibilité d’un objectif plus élevé. La gestion de l’activité devra être réévaluée individuellement : gestion identique à la boucle ouverte ou adaptation possible au mode activité en BF. »(6) Ces préconisations d’experts français font suite à celles d’un groupe d’experts européens(7) dont l’essentiel est regroupé dans l’encadré. Dans cette version européenne, un focus sur la gestion du système de DAI en fonction du type d’activité physique prévue (aérobie, anaérobie, mixte) a été proposé, dont les principaux points sont colligés dans le tableau.   Quelles sont les préconisations des fabricants ?   Les différents fabricants de systèmes de DAI actuellement disponibles sur le marché français ont émis des préconisations pratiques propres à chacun de leur système. Quelles sont les points marquants de ces préconisations ?   Système Minimed 780GSmartGuard® (Medtronic) Les préconisations concernant ce système ont été récemment modifiées en individualisant les types d’activité physique envisagées par les patients. Ces protocoles sont détaillés dans les figures ci-après pour une activité physique programmée de type aérobie ou anaérobie. Des algorithmes du même type ont été proposés par Medtronic pour une activité mixte ou une activité physique non programmée. Figure 1. Système Minimed 780G-SmartGuard® et activité physique aérobie. Figure 2. Système Minimed 780G-SmartGuard® et activité physique anaérobie.   Système Control-IQ® (Tandem) Pour ce système, plusieurs principes sont mis en place lorsque le mode « activité physique » est activé par les patients souhaitant pratiquer une activité physique. Il n’y a pas de spécificité selon le type d’activité physique réalisée (aérobie, anaérobie ou mixte). Lorsque l’activité exercice est activée et que ControlIQ prédit que dans les 30 prochaines minutes la valeur de glucose sera ≤ 140 mg/dL, l’administration d’insuline basale commence à diminuer. ControlIQ arrêtera l’administration d’insuline basale s’il prédit une valeur de glucose ≤ 80 mg/dL dans les 30 prochaines minutes si la baisse du basal n’a pas été suffisante. En cas d’activité physique relativement identique et régulière, il est donc utile de programmer un profil « sport » dans la pompe avec des débits de base diminués (de 50 % ou 75 % par exemple) qu’il faudra activer en plus du mode « exercice ». La technologie Control-IQ se basera alors sur des doses déjà plus faibles pour adapter le débit. Figure 3. Conséquences pratiques du mode « activité physique » avec Control-IQ.   Système mylife™ CamAPS® FX (Ypsomed) Dans ce système, il est possible de modifier l’objectif glycémique pour une durée déterminée, en fonction de l’intensité et de la durée de l’activité physique. Il est également possible d’utiliser la fonction « Ease-off » dont les caractéristiques sont résumées dans la figure 4 et qui doit idéalement être activée 60 à 90 minutes avant l’activité prévue mais également pendant et après cette activité selon le fabricant. Figure 4. Principes du mode « Ease-off » pour le système mylife™ CamAPS® FX.   Système DBLG1® (Diabeloop) Avec le système DBLG1, la prise en compte de l’activité physique est également prévue et un exemple de programmation de ce mode est reproduit dans la figure 5. En résumé le patient doit déclarer son activité au moins 1 heure avant pour permettre à la glycémie d’atteindre sa nouvelle cible (+70 mg/dL), le système ajustant la délivrance d’insuline en recommandant éventuellement un resucrage quantifié au patient avant le début de son activité physique. Figure 5. Exemple de programmation sur le terminal dédié du module de gestion de l’activité physique pour le système Diabeloop-DBLG1.   Système Omnipod-5 (Insulet) Dernier système arrivé sur le marché français, Omnipod-5 se démarque principalement des autres systèmes de DAI par l’absence de tubulure, un élément pouvant être déterminant en cas d’activité physique régulière. Les caractéristiques de la fonction « activité » préconisée en cas d’activité physique sont résumées dans la figure 6. Figure 6. Principe du module de gestion de l’activité physique pour le système Omnipod-5. D’après Berget C et al. Clin Diabetes 2022 ; 40(2) : 168-84.   CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES   • Si l’arrivée des systèmes de délivrance automatisée d’insuline a radicalement transformé le quotidien des patients vivant avec un diabète de type 1, l’utilisation de ces systèmes lors de la pratique d’une activité physique reste encore assez mal codifiée. • La multiplicité des paramètres influençant l’évolution glycémique au cours de celle-ci explique l’hétérogénéité des résultats et la nécessité actuelle de raisonner au cas par cas, patient par patient, système de DAI par système de DAI et activité par activité. • Cette approche individualisée sera peut-être progressivement remplacée par une approche plus générale avec l’optimisation des algorithmes de ces systèmes. • L’étude multicentrique française RAPPID centrée sur les pratiques de patients sportifs vivant avec un diabète de type 1 et utilisant un système de DAI est en cours et devrait contribuer à cette optimisation dans un avenir proche.

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