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Rein

Publié le 25 juin 2024Lecture 6 min

iSGLT2 : la protection cardio-rénale et au-delà

Michèle DEKER, Paris

Les inhibiteurs de SGLT2 ont largement fait la preuve de leurs bénéfices dans le cadre du diabète de type 2, de la maladie rénale chronique et dans l’insuffisance cardiaque. Certains de leurs effets sont aujourd’hui bien connus, d’autres un peu moins. Une table ronde a réuni, en marge du congrès de la Société francophone du diabète, trois spécialistes pour aborder ces questions : Sébastien Rubin, néphrologue (CHU de Bordeaux), Stéphane Manzo-Silbermann, cardiologue (hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris) et Alfred Penfornis, diabétologue (CHU Sud-Francilien, Corbeil-Essonnes).

Pourquoi, comment dépister la maladie rénale chronique chez les diabétiques ?   Une maladie rénale chronique (MRC) est retrouvée chez 30 à 40 % des patients avec un diabète de type 2, un peu moins souvent en cas de type 1. Sa présence implique des conséquences majeures, en particulier une augmentation considérable du risque cardiovasculaire au-delà du risque rénal, ce qui justifie son dépistage. Le dépistage repose sur : le dosage de la créatinine plasmatique qui permet d’estimer le débit de filtration glomérulaire (DFG) et le ratio albumine/créatinine urinaires (RAC) dosé sur un simple échantillon d’urines. Le diagnostic de MRC est posé sur ces deux éléments biologiques : diminution du DFG et/ou RAC attestant d’une protéinurie. Il est d’autant plus important que la prise en charge thérapeutique s’en trouve modifiée. L’arrivée des gliflozines (inhibiteurs de SGLT2) a radicalement changé la prise en charge de la MRC qui reposait auparavant sur les bloqueurs du système rénine-angiotensine (SRA). Chez les patients diabétiques, ces derniers avaient démontré une diminution du risque rénal d’environ 20 %. Les iSGLT2 ont été évalués en addition aux bloqueurs du SRA comparativement à ces derniers seuls, chez des patients dont le traitement était optimisé, et ont montré une diminution du risque rénal de 30 à 40 %. Pour les néphrologues, ces résultats sur la progression de la MRC ont été considérés comme un événement majeur dans la prise en charge de la MRC . Aujourd’hui, toutes les données disponibles sur l’effet des iSGLT2 dans la MRC, chez des patients diabétiques ou non, sont convergentes et entérinées par les recommandations KDIGO : un iSGLT2 devrait être prescrit en plus d’un bloqueur du SRA chez les patients ayant une MRC protéinurique. Le bénéfice est d’autant plus important que l’albuminurie est élevée. Il y a par ailleurs suffisamment de données montrant que ce traitement est également bénéfique chez les patients non protéinuriques, en termes de néphroprotection, après avoir instauré un bloqueur du SRA.   Quel bénéfice cardiovasculaire des iSGLT2 ?   Les bénéfices des iSGLT2 vont au-delà du ralentissement de la progression de la MRC. Le risque cardiovasculaire, déjà élevé chez les patients diabétiques, est encore majoré par l’existence d’une MRC. L’effet des iSGLT2 sur les événements cardiovasculaires a été largement démontré dans plusieurs essais cliniques. Une réduction des événements et de la mortalité globale ou cardiovasculaire de l’ordre de 17 à 20 % a ainsi été observée selon les études. L’étude DELIVER a analysé l’effet de la dapagliflozine sur un critère combiné associant la mortalité et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Une réduction majeure de la mortalité et de l’évolution vers l’insuffisance cardiaque a été démontré par cette étude. Après la mise à jour de l’algorithme SCORE (Score 2), qui estime le risque de mortalité et morbidité cardiovasculaire à 10 ans en fonction de l’âge, du sexe, du tabagisme, de la pression artérielle systolique et du taux de cholestérol non-HDL, un nouvel indicateur SCORE 2-Diabète a été mis à disposition en 2023. Il permet une estimation des risques chez les patients diabétiques et une aide au choix du traitement préventif. SCORE 2-Diabète tient compte de l’ancienneté et de l’âge de début du diabète, de l’équilibre glycémique (HbA1c) et aussi de la fonction rénale. Ce dernier paramètre est très important car la fonction rénale est, spécifiquement chez le diabétique, directement liée au pronostic. Elle sera déterminante pour apprécier le niveau de risque et son évolutivité. Score 2-Diabète sera utilisé dans les études afin de constituer des populations homogènes mais ce score mérite aussi d’être connu et utilisé en pratique clinique pour affiner les stratégies thérapeutiques dans l’objectif de retarder et au mieux d’éviter une évolution défavorable vers un événement aigu (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, etc.) et le décès. Les iSGLT2 sont efficaces chez les patients ayant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection diminuée, mais pas seulement. En effet, leur bénéfice s’observe aussi dans l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, ce qui implique de la part des cliniciens d’être davantage proactifs. Un patient ayant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée n’est pas forcément encore protéinurique. C’est néanmoins souvent l’amorce d’une aggravation de la maladie chronique, cardiaque puis rénale. La prescription d’un iSGLT2 dans cette situation permettra de ralentir l’évolution de l’insuffisance cardiaque, d’éviter l’hospitalisation pour décompensation et aussi de diminuer l’évolutivité vers l’insuffisance rénale. Les iSGLT2 sont ainsi considérés comme des traitements à visée cardiologique et rénale, tout autant que diabétologique.   Quels effets des iSGLT2 sur les autres complications du diabète ?   Le diabète de type 2 est une maladie complexe qui peut toucher de nombreux organes, au-delà du système cardiovasculaire et du rein. On pense notamment à la rétinopathie, complication microangiopathique, mais aussi à la MAFLD, stéatose hépatique d’origine métabolique (metabolic associated fatty liver disease), comorbidité souvent associée au diabète de type 2 qui augmente le risque cardiovasculaire déjà élevé des patients diabétiques et est considérée comme le premier pourvoyeur de carcinomes hépatocellulaires. Nous disposons de très peu d’études randomisées ayant exploré l’effet des iSGLT2 dans des indications autres que le diabète, le domaine cardiovasculaire et rénal. Toutefois, des études observationnelles sur de grandes cohortes de patients ayant un diabète de type 2 se sont intéressées à la rétinopathie, à la goutte, à la BPCO, par exemple. Malheureusement, il y a peu d’espoir que des études randomisées soient lancées pour explorer ces indications potentielles. Dans la MAFLD, maladie assez fréquente associée à une augmentation du risque cardiovasculaire, certains résultats sont en faveur d’un effet bénéfique des iSGLT2. Ainsi, les patients traités par iSGLT2 ont un risque cardiovasculaire diminué comparativement au patient s traités par d’autres comparateurs actifs. Ce bénéfice est observé non seulement en prévention secondaire mais aussi en prévention primaire. Les iSGLT2 semblent aussi exercer un effet bénéfique sur l’évolution de la maladie hépatique. À défaut d’arguments irréfutables issus d’études comparatives randomisées, nous disposons de nombreux d’arguments en faveur des iSGLT2 dans d’autres indications. C’est une raison supplémentaire de prescrire les molécules de cette classe thérapeutique, sans attendre, quand il s’avère nécessaire d’intensifier le traitement chez des patients diabétiques de type 2.   Faut-il vraiment interrompre les iSGLT2 avant une intervention ?   Certains protocoles préconisent d’interrompre le traitement par iSGLT2 avant une hospitalisation en vue d’une intervention. La raison en est la crainte de l’acidocétose, dont le risque serait augmenté par 2. Or, l’acidocétose est une complication très rare chez les patients diabétiques de type 2. Elle a été observée chez des patients à jeun, ayant interrompu leur traitement par insuline, dans une situation médicale ou chirurgicale aiguë. L’observation de ces cas très rares a fondé le dogme de l’arrêt du traitement par antidiabétiques avant une intervention. Toutefois, le doublement d’un risque d’événement très faible équivaut à un risque toujours aussi faible. Deux études se sont intéressées à la persistance du traitement par iSGLT2. L’une d’elles a montré que le taux de persistance des iSGLT2 s’améliore avec le temps. À 5 ans, 50 % des patients sont toujours traités par une molécule de la famille des iSGLT2 et la persistance s’améliore au fur et à mesure que les données sont disponibles. A contrario, seuls la moitié des patients ayant arrêté le traitement le reprennent, ce qui équivaut pour eux à une perte de chance. Dans un tiers des cas, les patients ayant interrompu le traitement avaient été hospitalisés juste avant. Une autre étude observationnelle a comparé deux populations de patients appariés au moyen de scores de propension : des patients ayant arrêté le traitement iSGLT2 en situation aiguë versus des patients ayant poursuivi le traitement. Il est intéressant de constater une diminution significative de la mortalité totale chez les patients ayant poursuivi le traitement versus autre groupe. Ces deux études incitent à remettre en question le dogme de l’arrêt de ISGLT2 en situation aiguë fondé sur une crainte « fantasmatique ». Cela éviterait les oublis de reprise des traitements au décours de l’événement et favoriserait la conduite du traitement au long cours avec les iSGLT2, qui ont montré des bénéfices sur des critères cliniques indiscutables. D’après une table ronde AstraZeneca avec la participation de S. Rubin, S. Manzo-Silbermann et A. Penfornis SFD 2024

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