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Editorial

Publié le 28 avr 2023Lecture 2 min

Grève de la prescription ou retraite anticipée des prescripteurs ?

Bruno GUERCI, Endocrinologie, diabétologie et nutrition, Hôpital Brabois Adultes, CHRU de Nancy

Les preuves sont désormais nombreuses concernant la protection d’organes des classes médicamenteuses agonistes des récepteurs au GLP-1 (AR GLP-1) et inhibiteurs des cotransporteurs sodium-glucose de type 2 (iSGLT2). La place de ces molécules dans la stratégie thérapeutique ne cesse d’évoluer, avec de nouvelles indications et leur remboursement, même hors champ du diabète pour ce qui concerne l’insuffisance cardiaque et la maladie rénale chronique. Alors, comment expliquer le retard à prescrire ces traitements chez les patients qui pourraient en tirer un bénéfice clinique significatif, un évitement des complications, une réduction de la morbi-mortalité liée au diabète ? Poids des habitudes, inertie, crainte des effets secondaires ou de la nouveauté tout simplement. Sans doute un peu de tout cela. Pourtant ce numéro fait encore une place de choix à l’efficacité de ces traitements, notamment en néphrologie.

L’étude CAPTURE, conduite en 2019 dans 13 pays, avait déjà mis l’accent sur le manque d’adéquation entre le nombre de patients présentant une maladie cardiovasculaire avérée ou une accumulation de facteurs de risque cardiovasculaires et le niveau de prescription des AR GLP-1 ou iSGLT2 au sein de ces populations. Spécifiquement en France, les AR GLP-1 sont disponibles depuis 2008 pour les formes pluriquotidiennes, et 2015 pour les formes hebdomadaires et nous en connaissons l’efficacité et la sécurité d’emploi. En revanche, le premier médicament de la classe des iSGLT2 a été lancé bien plus tard, le 1er avril 2020 : à croire que c’était une blague ! Sur ce, deux nouvelles études conduites en Europe viennent éclairer cette problématique récurrente de l’inertie thérapeutique et la résistance au changement. Dans l’étude conduite en Suède auprès de patients atteints de diabète de type 2, entre la moitié et 80 % des patients atteints de diabète de type 2 étaient éligibles à un traitement par iSGLT2 ou AR GLP-1 conformément aux recommandations européennes de 2019 de ADA/EASD ou l’ESC, mais seulement de 25 à 34 % d’entre eux recevaient réellement le traitement recommandé. Une seconde étude réalisée au Pays de Galles, retrouve un niveau bien insuffisant autour de 50 % d’atteinte des d’objectifs thérapeutiques de prévention cardiovasculaire secondaire, avec une situation plus défavorable encore pour les femmes comparées aux hommes. Nos collègues cardiologues et néphrologues semblent en revanche s’être appropriés ces nouveaux traitements, en appliquant de facto de nouvelles recommandations comme celles de l’European Society of Cardiology en 2021 pour l’insuffisance cardiaque, ou celles du Kidney Disease: Improving Global Outcomes (KDIGO) en 2022 pour la maladie rénale chronique. Nous disposons pourtant aussi d’un consensus clair, rédigé par un comité d’experts au nom de la SFD, et de celui de l’ADA/EASD qui rappelle la place de ces molécules dans la stratégie du diabète de type 2, notamment en cas de comorbidités cardiaques et/ou rénales. Alors, il est temps de passer à l’action, de faire bénéficier nos patients des meilleures stratégies thérapeutiques possible, de laisser derrière nous « l’ancien monde » de la diabétologie et de gérer à la hauteur de sa gravité cette pathologie et ses conséquences médicales encore trop nombreuses.

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