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Congrès

Publié le 31 mar 2012Lecture 6 min

Rein et cœur : un couple indissociable chez le diabétique

M. DEKER


Cœur et diabète
La néphropathie diabétique n’est pas une maladie uniforme dans sa présentation et son évolution, ce qui implique des modalités de prise en charge adaptées à chaque patient. L’albuminurie et le débit de filtration glomérulaire ont chacun une valeur pronostique indépendante, et devraient être évalués dans le calcul du risque vasculaire, afin de mieux guider le traitement.

Classiquement, l’histoire naturelle de la dégradation de la fonction rénale chez le diabétique débute par une hyperfiltration ; une fois la néphropathie débutée, l’excrétion urinaire d’albumine augmente progressivement pour atteindre en 10 à 15 ans le stade de protéinurie et, parallèlement, le débit de filtration glomérulaire (DFG) diminue. Cette évolution n’est cependant pas aussi linéaire que décrite ainsi car toutes les microalbuminuries n’évoluent pas vers la protéinurie : certains patients voient leur protéinurie régresser, alors qu’elle progresse chez d’autres ; un pourcentage important de malades en insuffisance rénale sont pauci-albuminuriques. En somme, l’insuffisance rénale ne se résume pas à la seule progression de l’albuminurie ; le DFG possède une valeur pronostique indépendante. L’albuminurie peut être considérée comme un facteur de risque de développement d’une insuffisance rénale, c’est un marqueur de risque de mortalité et de morbidité cardiovasculaire, sa diminution sous traitement a aussi une valeur pronostique. Le rein et le système cardiovasculaire sont indissolublement liés : la dégradation de la fonction rénale favorise la rétention hydrosodée et le développement d’une HTA ; inversement, l’atteinte vasculaire favorise l’atteinte rénale par le bas débit, la survenue d’un syndrome cardiorénal. S’y ajoutent des altérations du métabolisme phosphocalcique, la carence en vitamine D, l’anémie, etc. Les malades en insuffisance rénale chronique, qui doivent être considérés comme à très haut risque, sont en fait moins bien pris en charge qu’ils ne le devraient, si l’on se réfère aux données du registre REACH où la prescription des antiagrégants plaquettaires, des statines et des antihypertenseurs est d’autant plus faible que la fonction rénale est dégradée. Chez le diabétique, le contrôle intensif de la glycémie a démontré sa capacité à diminuer le risque d’apparition d’une microalbuminurie et d’une insuffisance rénale. Comment adapter le traitement antidiabétique oral chez l’insuffisant rénal ? Les risques iatrogènes – hypoglycémie, acidose lactique, rétention hydrosodée, prise de poids – sont essentiellement liés à l’accumulation des médicaments chez le diabétique insuffisant rénal. Chez ce dernier, l’objectif d’HbA1c à 7 % doit être nuancé, d’autant que l’HbA1c devient progressivement un mauvais indicateur du risque glycémique à mesure que l’insuffisance rénale progresse, et une approche personnalisée doit prévaloir. La metformine a démontré dans le registre REACH qu’elle diminue le risque relatif de mortalité chez les patients ayant une clairance de créatinine entre 60 et 30 ml/min. Le classique risque d’acidose lactique semble surévalué ; en effet, sur plus de 50 000 diabétiques traités pendant 10 ans au Royaume-Uni, 3,3 cas/100 000 patients-années ont été dénombrés comparativement à 4,8 sous sulfamides, tous survenus à l’occasion d’un événement intercurrent. Les experts considèrent que la metformine reste le traitement de première intention, même en cas d’altération de la fonction rénale ; sa posologie doit cependant être réduite de moitié pour une ClCr entre 60 et 30 ml/min et le produit arrêté pour une ClCr < 30 ml/min. Les inhibiteurs de l’alphaglucosidase, dont les métabolites actifs sont potentiellement hépatotoxiques, peuvent être prescrits à moins que le taux de créatinine soit > 20 mg/l. Les sulfamides augmentent par 3 le risque d’hypoglycémie comparativement à la metformine chez l’insuffisant rénal. Il faut tenir compte de leur métabolisme hépatique en produits actifs ou inactifs qui seront éliminés par le rein et risquent de s’accumuler. Aussi est-il préférable d’utiliser des produits ayant des métabolites inactifs et à demi-vie courte (glipizide, gliclazide), possiblement chez le diabétique ayant une ClCr > 30 ml/min et en diminuant la posologie. Le répaglinide peut être maintenu à la même posologie jusqu’à 30 ml/min. Il n’existe pas de recommandation précise concernant les gliptines dans la mesure où cette classe thérapeutique est trop récente. Leurs propriétés pharmacocinétiques ne sont pas modifiées pour une ClCr > 50 ml/min. Entre 50 et 30 ml/min, une réduction de moitié de la dose est recommandée. La sitagliptine a été comparée au glipizide chez des diabétiques ayant une insuffisance rénale modérée à sévère, avec des résultats d’efficacité équivalents sur le contrôle glycémique, un moindre risque d’hypoglycémie et de prise de poids. Le traitement par sitagliptine n’a pas eu d’impact sur l’évolution de la fonction rénale. Une autre étude chez des patients en insuffisance rénale terminale a donné des résultats comparables. Des études réalisées avec la vildagliptine et la linagliptine confirment la bonne tolérance, la sécurité d’emploi et le maintien de l’efficacité des gliptines chez le diabétique insuffisant rénal. Approche lipidique chez l’insuffisant rénal Les résultats de l’étude SHARP prennent un relief particulièrement important pour la gestion de l’insuffisance rénale en montrant qu’il est possible de réduire le risque d’événements athérosclérotiques grâce à l’association ézétimibe/simvastatine dans cette population à très haut risque cardiovasculaire. À cet égard, les dernières recommandations conjointes ESC/EAS ont distingué dans la plus haute catégorie de risque cardiovasculaire, deux sous-catégories, dont le très haut risque qui inclut les patients ayant une insuffisance rénale modérée. Au-delà de ce haut risque vasculaire, les insuffisants rénaux présentent une dyslipidémie, caractéristique : LDL normal ou légèrement augmenté avec une augmentation des particules LDL petites et denses, triglycérides élevés avec une augmentation des remnants d’où une augmentation de l’apo B, HDL bas et Lp(a) élevée. Aucun hypolipidémiant n’est innocent par rapport au risque glycémique : les statines augmentent le risque de diabète ; les résines ont un effet favorable sur l’HbA1c ; l’acide nicotinique a un effet délétère sur la glycémie, mais peut-être un effet favorable sur le rein ; les fibrates augmentent la créatinine, mais n’ont pas d’impact sur l’évolution de la fonction rénale (ils sont néanmoins contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale sévère) ; les inhibiteurs de la CETP diminuent le risque de diabète ; l’ézétimibe semble neutre sur la glycémie et pourrait avoir un effet bénéfique sur le NASH. Précédemment à l’étude SHARP, deux études d’intervention avec des statines dans l’insuffisance rénale s’étaient révélées négatives, alors que tout portait à croire que leur effet favorable sur le risque cardiovasculaire, quelle que soit la fonction rénale, se traduirait par un bénéfice. SHARP a démontré une réduction du risque d’événements athéroscléreux sous ézétimibe/simvastatine, quel que soit le sous-groupe (état de la fonction rénale, diabète ou non, âge), dans une proportion attendue comparativement à la métaanalyse des Trialists. Ce résultat a été obtenu sans que soit observé le moindre signal de sécurité d’emploi et avec une très bonne tolérance. Symposium réalisé avec le soutien de MSD et la participation de R. Roussel (Paris), P. Fontaine (Lille) et E. Bruckert (Paris). Cœur & Diabète, 10 février 2012, Paris.

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