Éducation-Législation
Publié le 31 mar 2012Lecture 4 min
De l’information du patient à l’éducation thérapeutique
B. SANDRIN-BERTHON, A. PENFORNIS Association française pour le développement de l’éducation thérapeutique (Afdet), Paris (http://www.afdet.net/) ; Service d’endocrinologie-métabolisme et diabétologie-nutrition, CHU de Besançon
Si l’on en juge par le nombre d’articles, de rapports, de communications ou de congrès qui lui sont consacrés, l’éducation thérapeutique du patient est un sujet à la mode.
La loi HPST et ses décrets d’application publiés en août 2010, lui ont fourni un cadre réglementaire1. Dorénavant, toute équipe qui souhaite mettre en œuvre un programme d’éducation thérapeutique doit en demander l’autorisation à l’Agence régionale de santé de son territoire. Il est également recommandé aux professionnels de se former à cette activité. Les médecins, infirmiers, diététiciens et autres soignants n’ont, bien sûr, pas attendu les textes officiels pour, dans leur exercice quotidien, inciter, encourager, aider les patients à prendre soin d’eux-mêmes, à suivre les traitements prescrits, à respecter les conseils délivrés. Alors, quelle est la différence entre, d’une part, informer, expliquer, conseiller et, d’autre part, éduquer ?
Le tableau présenté ci-dessous a pour objectif de clarifier le sens de chacun des ces termes.
Si l’éducation thérapeutique a pour but d’aider les patients à « prendre soin d’eux-mêmes, en favorisant leur implication dans les choix et les actions relatives à leur santé »2, on peut admettre que les informations, les explications et les conseils délivrés par les professionnels de santé y contribuent ou, tout au moins, en constituent le préalable.
Informer et conseiller sont des activités essentielles des professionnels de santé, qu’il ne s’agit évidemment pas de récuser. On peut toutefois reconnaître que les informations ne sont pas toujours entendues ou comprises, que les conseils sont souvent difficiles à suivre, en particulier lorsqu’ils concernent des habitudes de vie bien établies, a fortiori s’ils doivent être appliqués au long cours (arrêt du tabac, changement d’alimentation, reprise d’une activité physique régulière, prise médicamenteuse à vie, etc.). On peut essayer de comprendre pourquoi.
L’information et l’explication sont principalement centrées sur les connaissances
Le professionnel veille à la qualité des informations qu’il transmet, à la justesse de ses explications. Il s’applique, pour cela, à maintenir à jour les connaissances médicales relevant de sa compétence. Pour être sûr que le patient a compris, il peut prendre l’habitude de l’inviter à reformuler : « Je ne suis pas sûr que mes explications aient été claires : pourriez-vous me dire ce que vous retenez de tout cela ? » Même si le patient a compris ce que le soignant lui a expliqué, cela ne garantit évidemment pas qu’il soit en mesure d’appliquer les recommandations qui en découlent.
Le conseil est généralement plus personnalisé que la simple information. Pour délivrer un conseil adapté, le professionnel étudie la situation du patient : il utilise, pour cela, ses compétences, son mode de raisonnement, sa propre grille d’analyse. C’est la raison pour laquelle on dit que le conseil est centré sur celui qui le délivre : « Voilà ce que je pense de votre état de santé, voilà ce que je ferais si j’étais à votre place ».
Le conseil a des chances d’être suivi s’il ne vient pas trop bousculer la façon de penser et d’agir du patient, autrement dit si la « grille de lecture » du patient est assez semblable à celle du soignant. En revanche, si le conseil donné est très éloigné de l’analyse que le patient fait de sa situation ou si le conseil n’a pas de sens pour le patient ou si le patient se pense incapable de le suivre, son adhésion éventuelle ne pourra être que superficielle et éphémère.
Qu’il s’agisse d’informer, d’expliquer ou de conseiller, l’essentiel du travail est réalisé par le professionnel : on attend du patient qu’il réponde aux questions qu’on lui pose, qu’il se laisse examiner, qu’il écoute attentivement les informations, les explications et les conseils et qu’il s’efforce de suivre les préconisations qui lui sont faites. Il est ainsi maintenu dans une attitude relativement passive alors que, paradoxalement, on lui demande d’être actif pour sa santé. Or, le meilleur moyen, pour quiconque, de s’impliquer dans une action n’est pas d’appliquer passivement ce qu’un autre vous conseille, même si cet autre est médecin !
Pour que le patient prenne soin de lui-même, il faut bien sûr qu’il soit convenablement informé et conseillé par les soignants mais cela ne suffit pas.
La démarche éducative est centrée sur le patient ou, plus précisément, sur la relation entre le soignant et le patient
Une relation de confiance, certes, est indispensable mais c’est surtout une relation d’équivalence qui permet un vrai partenariat. Il ne s’agit pas, pour le soignant, de définir les objectifs à atteindre et les compétences à acquérir pour, ensuite, les faire valider par le patient. Le soignant et le patient ont à réfléchir ensemble, à analyser ensemble la situation (médicale, personnelle, familiale, sociale, etc.) du patient puis à imaginer ensemble les solutions qui leur paraissent les mieux adaptées.
À titre d’exemple, voici un guide exemple d’entretien que l’on peut utiliser pour amorcer une démarche éducative avec un patient, si l’on veut aller au-delà des informations, explications et conseils dont on a l’habitude (encadré).
Conclusion
En fin d’entretien, la synthèse de ce qui a été dit permet de convenir avec le patient d’un plan d’action, de définir avec lui des priorités, des objectifs de changement, des démarches à entreprendre, etc.
Cette façon de procéder place d’emblée le patient en situation active : le soignant l’invite et l’encourage à s’exprimer, à réfléchir, à faire des choix, à imaginer des solutions aux difficultés qu’il rencontre…
La posture éducative alors adoptée par le soignant est très différente de l’attitude d’expertise dont il a l’habitude et qui prévaut quand il informe, explique ou conseille le patient.
C’est bien là que se situe la plus grande différence entre, d’une part, l’information, l’explication et le conseil et, d’autre part, l’éducation.
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