publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Nutrition

Publié le 31 mai 2011Lecture 7 min

La saga alimentaire - De Lucy à Mac Do (2e partie)

L. MONNIER, C. COLETTE, Institut universitaire de recherche clinique, Montpellier

L’homme a toujours souhaité varier son alimentation, mais pour que cette variété atteigne son plein développement, il a également cherché de nouveaux moyens de transformation et de conservation alimentaire. C’est cette histoire que nous allons brièvement conter dans cette deuxième partie.

Histoire de la conservation des aliments   De nos jours, il est bien connu qu’il faut diminuer la disponibilité de l’eau dans les aliments pour empêcher la prolifération microbienne et pour permettre leur conservation1. L’adjonction de sel ou de sucre, le séchage, sont des procédés de conservation qui sont basés sur ce principe, mais il est bien évident que nos ancêtres ignoraient tout des bases scientifiques de ces méthodes qu’ils utilisaient de manière totalement empirique. Au 2e millénaire avant J.-C., c’est-à-dire bien avant la fondation de Rome, la salaison était utilisée comme méthode de conservation pour les viandes, les poissons, les olives. En plus du séchage, le fumage est un moyen de conservation des poissons connu depuis l’antiquité. La fumée utilisée dans le fumage contient de nombreux composés volatiles comme l’acétaldéhyde, l’acétone, des phénols et polyphénols qui ont un pouvoir antiseptique2. Nos ancêtres n’en savaient rien, mais ils employaient ce procédé. Le sel, conservateur de base de nombreux produits alimentaires, a été pendant plusieurs siècles une denrée stratégique et recherchée. Ce n’est pas par hasard que la gabelle avait été instaurée comme impôt par les rois de France dès le moyen âge. Aujourd’hui, ces procédés de conservation ancestraux sont toujours d’actualité. La guerre livrée par les nutritionnistes et en particulier par les hypertensiologues aux industriels de l’agroalimentaire, suspectés de saler abusivement les aliments disponibles en grande distribution, n’est qu’un épisode de plus à verser au dossier de la saga du sel utilisé comme conservateur à travers les âges. Le XIXe siècle et le début du XXe siècle ont vu apparaître de nouvelles méthodes de conservation qui ont contribué à inaugurer l’ère de l’alimentation industrielle. Deux savants français ont participé à cet avènement : Louis Pasteur pour le procédé de pasteurisation et Nicolas Appert pour le procédé de stérilisation, souvent désigné sous le terme d’appertisation en hommage à son inventeur. Ces deux méthodes font partie d’un groupe de procédés plus généraux qui englobent les procédés physiques de conservation par la chaleur, le froid, l’irradiation et la lyophilisation.   Les procédés de conservation par la chaleur2 La pasteurisation consiste à utiliser des températures relativement faibles. Pour le lait, les températures appliquées sont de 85° C pendant 15 à 20 s. D’autres produits alimentaires comme les jus de fruits, les conserves de fruits, peuvent être soumis au procédé de pasteurisation. Il convient de souligner que cette méthode ne détruit pas les germes. Elle ne fait que stabiliser le produit en empêchant la prolifération ultérieure des micro-organismes mais sans détruire ceux qui sont déjà présents. Un produit pasteurisé doit être conservé entre 0° C et 6° C et consommé dans un délai maximal de 7 jours. La stérilisation ou appertisation met en jeu des températures élevées pendant un court intervalle de temps. Elle est utilisée dans la fabrication des conserves en sachant que certaines vitamines thermosensibles peuvent être détruites : vitamines B1 et C. En revanche, les molécules de texture sont en général préservées. La stérilisation est également utilisée dans les laits UHT (Ultra Haute Température) avec chauffage à 140-150° C pendant quelques secondes. La stérilisation est un procédé qui détruit les micro-organismes présents dans le produit. Le lait UHT peut être conservé pendant 90 jours si l’emballage reste fermé.   Les procédés de conservation par le froid : réfrigération, congélation et surgélation2 La réfrigération est un procédé de conservation à court terme à une température de 2 à 5° C. Elle n’empêche pas la croissance des micro-organismes. La congélation empêche la croissance des micro-organismes mais elle ne détruit pas ceux qui sont déjà présents dans le produit. En général, la croissance des micro-organismes est bloquée à partir de -3° C. La température de sécurité utilisée dans la congélation est de -18° C. Pour certains produits tels que les poissons, les crèmes glacées, les températures de congélation conseillées sont plus basses : -30° C. La congélation est un procédé qui permet une excellente préservation des qualités organoleptiques du produit alimentaire. Cependant, elle peut avoir des effets délétères sur les structures tissulaires en entraînant des délabrements au niveau de l’architecture des cellules végétales. La congélation lente (baisse de la température > 10° C/minute) entraîne la formation de cristaux de glace extracellulaires qui dilacèrent les parois cellulaires et entraînent un déplacement d’eau du milieu intracellulaire vers le milieu extracellulaire avec effondrement des structures cellulaires (figure). Au moment de la décongélation, on assiste à une exsudation importante d’eau et à un ramollissement des tissus, lequel donne un aspect peu présentable au produit décongelé (figure). Ce procédé a donc un certain nombre de limitations en particulier quand il est appliqué aux produits alimentaires d’origine végétale. Pour minimiser les phénomènes d’exsudation et l’effondrement des structures cellulaires végétales, il convient d’utiliser le procédé de surgélation qui n’est rien d’autre qu’une congélation accélérée. Dans ce cas, il y a formation de microcristaux qui n’entraînent pas d’éclatement des structures cellulaires. Ceci permet de minimiser les phénomènes d’exsudation au moment de la décongélation à condition que celle-ci soit rapide : réchauffage par micro-ondes. Ce procédé de surgélation peut être appliqué à la conservation des végétaux. D’un point de vue général, ce sont les procédés thermiques les plus intenses et les plus courts comme la stérilisation ou la surgélation qui assurent la meilleure préservation des qualités physiques (texture) et organoleptiques des aliments. La lyophilisation est un procédé sûr qui est utilisé pour certains produits : lait en poudre par exemple. Ce type de lait peut être conservé pendant un an, l’emballage étant fermé. Le principe de la lyophilisation est basé sur la réduction de la disponibilité de l’eau qui dans ce cas est réduite à zéro puisque le procédé est destiné à supprimer la totalité de l’eau présente dans le produit alimentaire. Figure. Effet de la congélation lente ou rapide (surgélation) sur les structures tissulaires des aliments. La surgélation assure la préservation des structures cellulaires au moment de la décongélation alors que la congélation lente ne le permet pas. L’irradiation des aliments par des rayonnements gamma Elle est destinée à détruire tous les parasites ou micro-organismes présents dans les produits céréaliers après la récolte. L’irradiation étant réalisée avec une source externe, le risque de contamination radioactive est totalement absent. Quelques écologistes mal informés pensent parfois le contraire. Malheureusement, ils continuent à agiter les foules de manière irresponsable en faisant croire aux consommateurs que la stérilisation par irradiation est dangereuse. Au terme de cette première partie, nous sommes déjà entrés dans le XXe siècle et dans la nutrition industrielle avec les procédés physiques de conservation des aliments. Toutefois, nous nous sommes arrêtés au seuil de la dernière révolution alimentaire qui nous conduira à la disparition des maladies carentielles tout au moins dans les pays développés. Cette ère débute avec le début du XXe siècle et elle trouvera son complet épanouissement à la fin de la 2e Guerre mondiale. C’est à cette date que commence l’alimentation moderne avec ses qualités et ses défauts. L’alimentation plus saine, plus hygiénique, a permis d’améliorer le statut nutritionnel général des populations. En revanche, l’abondance alimentaire à des coûts de plus en plus faibles a conduit au phénomène de surnutrition avec son cortège de pathologies : obésité, syndrome plurimétabolique, etc. Pour terminer ce chapitre de manière objective, nous rappellerons que l’homme n’a jamais vécu aussi longtemps et que l’espérance de vie atteint des records inégalés. N’oublions pas que l’homme avait une espérance de vie de l’ordre de 30 ans à l’époque romaine. Il a fallu attendre le début du xxe siècle pour que l’espérance de vie moyenne atteigne 55 ans, soit un gain de 25 ans sur une période de 2 000 ans.   Conclusion En un siècle, de l’année 1900 à l’an 2000, nous avons progressé de plus de 25 ans pour atteindre une espérance de vie voisine de 80 ans. Nous avons parcouru au cours de ces dernières années ce que l’homme avait péniblement accompli au cours des 20 siècles passés. Il est évident que les progrès de la médecine ne sont pas étrangers à cette évolution mais l’alimentation moderne, malgré tous les défauts dont on l’accable, a certainement contribué à l’allongement de la vie humaine. Suite au prochain numéro…

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème