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Cardio-diabétologie

Publié le 08 avr 2019Lecture 6 min

Expérience des inhibiteurs de SGLT2 à l’étranger

Michèle DEKER, Paris - D’après André SCHEEN (Liège, Belgique)

Les mécanismes d’action qui sous-tendent les bénéfices cardiaques et rénaux des iSGLT2 sont en partie hypothétiques. Les iSGLT2 allient des effets métaboliques et hémodynamiques, sans doute variables d’un patient à l’autre. Une question non résolue est de déterminer si la protection cardio-rénale mise en évidence dans les essais cliniques concerne tous les patients ou certains seulement. La majorité des patients inclus dans les essais cliniques étaient en prévention secondaire mais cette population n’est pas homogène puisqu’elle inclut des patients ayant déjà présenté un événement cardiovasculaire et d’autres ayant une maladie athéromateuse démontrée. La comparaison des résultats par sous-groupes, montre toujours de meilleurs résultats en prévention secondaire.
A contrario, dans le registre observationnel CVD-REAL, 80 % des patients étaient en prévention primaire, un effet bénéfique du traitement est observé en prévention primaire sur les hospitalisations pour insuffisance cardiaque, mais aussi sur les événements cardio- et cérébrovasculaires ischémiques et sur la mortalité. On pourrait objecter qu’il existe un biais d’inclusion dans les études en vie réelle, que les scores de propension ne peuvent éliminer.

Quelle expérience en Belgique ? Les iSGLT2 sont disponibles en Belgique depuis 4 ans. Comme dans tous les pays où les iSGLT2 ont été introduits, leur prescription progresse lentement et reste bien en-deçà de celles des iDPP4 et des sulfamides. Ils sont un peu plus onéreux que les gliptines mais beaucoup moins que les aGLP1. Les iSGLT2 ne disposent pas d’AMM dans le diabète de type 1, ni aux États-Unis ni en Europe. Leur mécanisme d’action est indépendant de la cellule bêta et de l’insulinorésistance, ce qui a motivé des essais dans cette indication. Il en ressort que ces molécules diminuent l’HbA1c, le poids et surtout les fluctuations glycémiques. En revanche, le risque d’acidocétose est augmenté dans le type 1. La FDA a refusé l’indication en raison d’une balance bénéfice/risque discutable. En Belgique, les iSGLT2 peuvent être prescrits indifféremment par un médecin généraliste ou spécialiste, le diabète de type 2 étant du ressort de la médecine générale. Contrairement aux aGLP1 dont la gestion est assez complexe, les iSGLT2 sont faciles à prescrire. Ils sont remboursés en ajout d’un autre antidiabétique, y compris si le patient est intolérant à la metformine, si l’HbA1c est > 7 % et < 9 %, ce qui est paradoxal dans la mesure où toutes les études ont montré que plus la glycémie et l’HbA1c sont élevées plus le bénéfice sur l’équilibre glycémique est important ; le seuil de 9 % aurait été choisi afin de ne pas favoriser l’inertie thérapeutique en freinant le recours à l’insuline basale. La poursuite du remboursement est conditionnée à l’obtention d’une HbA1c < 7,5 % ou d’une réduction de ≥ 0,5 % de l’HbA1c. Une autre condition de prescription est un DFG ≥ 60 ml/min. Il n’y a pas de critère cardiovasculaire ni de critère de poids, contrairement aux aGLP1 (IMC > 30 kg/m2). Les iSGLT2 peuvent donc être prescrits en Belgique : en bithérapie en ajout de la metformine ou d’un sulfamide ; en trithérapie avec les autres ADO, y compris une glitazone, ou en combinaison avec l’insuline basale ou n’importe quelle insuline. En pratique, le remboursement d’un iSGLT2 en Belgique n’est possible en trithérapie que si la gliflozine est ajoutée après la combinaison metformine + iDPP4 et non si l’iDPP4 est ajouté après la combinaison metformine + iSGLT2. Certaines caractéristiques phénotypiques pourraient orienter le choix entre un iDPP4 et un iSGLT2 : 1. Infections urogénitales, déshydratation, hypotension. 2. Pancréatite. Questions pratiques sur les iSGLT2 • Un ajustement des diurétiques est-il systématiquement nécessaire à l’initiation d’un iSGLT2 ? Il ne faut pas nécessairement interrompre les diurétiques à l’initiation du traitement. La dose de diurétique peut être réduite si la pression artérielle est basse. La prudence s’impose chez le patient âgé en raison du risque d’hypotension orthostatique. Il en est de même si le patient prend un diurétique de l’anse, même si un risque n’est pas formellement démontré par un essai clinique spécifique. L’effet diurétique des iSGLT2 est quasiment imperceptible par le patient, correspondant à environ 300 ml maximum de diurèse supplémentaire sur les 24 heures. L’horaire de prise du traitement n’est pas fixe (matin ou soir, plutôt le matin). • Faut-il faire une évaluation volémique du patient et comment ? En pratique, cette évaluation n’est pas conseillée. La mesure de la pression artérielle est suffisante. Elle permet d’ajuster le traitement antihypertenseur en cas d’hypotension orthostatique. Les iSGLT2 induisent une diurèse osmotique, sans répercussion sur le ionogramme sanguin, notamment sur le potassium. • Qu’en est-il de la gestion des mycoses ? Les infections mycosiques sont incontestablement plus fréquentes sous traitement (risque x 3-5), en pratique comme dans les essais cliniques (8-10 % vs 3 % sous placebo). L’incidence de ces infections est plus élevée chez les femmes que chez les hommes. La prescription initiale d’un antimycosique n’est pas systématiquement recommandée. En revanche, la patiente doit être informée du risque et des conseils d’hygiène sont prodigués. En général le traitement local suffit et il y a peu de récurrences, malgré la persistance de la glycosurie. Les infections urinaires ne sont pas significativement augmentées, ce qui pourrait s’expliquer par l’amélioration du contrôle métabolique sous iSGLT2 et sans doute un gain en termes de défense immunitaire. Des antécédents d’infections urogénitales à répétition constituent un argument pour ne pas prescrire ce traitement, ou du moins à la prescrire avec prudence. • Peut-on prescrire un iSGLT2 chez les sujets âgés ? Les sujets âgés sont plus sensibles à la déshydratation et à risque d’hypotension. La perte de poids n’est pas un objectif chez ces patients. Il existe peu de données publiées dans cette population et aucune étude spécifique. Le sujet âgé n’est probablement pas un candidat idéal pour ce traitement, d’autant que la protection cardio-rénale risque de ne pas être mesurable à un âge avancé. La prescription d’un iSGLT2 devra donc être envisagée au cas par cas. • En pratique, qu’en est-il du risque d’acidocétose ? Si le risque d’acidocétose est problématique chez le diabétique de type 1, il est très rare chez le patient diabétique de type 2. En revanche, chez un patient dont l’insulinosécrétion est très faible et qui gère mal son insulinothérapie, le risque d’acidocétose se rapproche de la situation du diabète de type 1. Les cas publiés montrent la survenue plus fréquente de cette complication en période périchirurgicale. Cette situation cumule trois circonstances favorisantes : une gestion imparfaite de l’insuline en service chirurgical (patient sous-insuliné) ; une carence d’apports glucidiques ; le stress chirurgical (augmentation des hormones de contre-régulation). En pratique, l’acidocétose peut être évitée simplement ; il faut arrêter l’iSGLT2 en périopératoire pour le reprendre ultérieurement. Il n’est pas demandé aux patients de mesurer les corps cétoniques en routine. • Le risque d’amputation est-il une limite à la prescription des iSGLT2 en général ou de l’un d’entre eux en particulier ? Ce risque a principalement été décrit pour la canagliflozine, dans l’étude CANVAS et rapporté auprès de la FDA surtout avec cette gliflozine. Un petit risque supplémentaire est probable, dont le mécanisme est inconnu (Pourquoi la canagliflozine principalement ? Quel est le profil des patients ayant présenté cette complication dans CANVAS ?). L’effet diurétique des gliflozines pourrait se surajouter à celui des diurétiques prescrits par ailleurs, responsable d’une hypovolémie relative, aggravant l’ischémie périphérique. La seule étude ayant évalué une gliflozine chez des patients artéritiques est EMPAREG. Elle a montré des résultats équivalents en prévention cardiovasculaire et pas davantage d’amputations. Toutefois cette étude, conçue avant CANVAS, ne recherchait pas systématiquement les amputations. Chez les patients artéritiques, qui sont à priori à haut risque coronarien, le bénéfice/risque du traitement est favorable ; le risque d’amputation peut être prévenu par une prise en charge adaptée. En cas d’antécédents d’ulcères ou d’amputation, il vaut mieux ne pas prescrire de gliflozine. • Quid des gangrènes de Fournier ? La gangrène de Fournier est une infection périnéale, responsable d’une fasciite nécrosante des organes génitaux externes, sur un terrain artériel et immunodéprimé. Cette affection rarissime a fait l’objet d’un warning de la FDA (réclamant l’attention mais non étayée par des preuves formelles). En pratique, aucun cas n’a été signalé en Belgique. Dans l’étude DECLARE-TIMI 58, il a été dénombré 5 cas dans le groupe placebo, versus 1 cas dans le groupe dapagliflozine. Aucun cas n’a été rapporté dans les autres études, ce qui relativise ce risque. Avec le soutien institutionnel de   

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