Publié le 31 mai 2011Lecture 4 min
Diabète et grossesse - Devenir maternel après un diabète gestationnel : comment dépister et prévenir le diabète de type 2 ?
O. VERIER-MINE, hôpital Jean Bernard, Valenciennes
Il existe une parenté physiopathologique entre le diabète gestationnel (DG) et le diabète de type 2 (DT2) (insulinorésistance, insulinopénie relative) ; aussi la survenue du DT2 est-elle attendue. Le dépistage du DG sélectionne une population à haut risque de DT2, chez qui des mesures préventives vont pouvoir être proposées.
Ainsi, trois défis se présentent après un DG :
• diagnostiquer l’éventuel DT2 sans retard ;
• proposer aux autres femmes une stratégie de surveillance adaptée à leur risque de survenue du DT2, et mettre en place les mesures pour éviter le DT2 à celles qui y sont les plus exposées ;
• en cas de souhait de nouvelle grossesse, si la normalité glycémique a pu être affirmée, il faut éviter la récidive du DG ; sinon, il faut prévenir la conception en hyperglycémie.
Ces défis concernent autant les spécialistes, gynéco-obstétriciens, endocrinologues, que les médecins de famille. Nous sommes tous impliqués !
Diagnostiquer le DT2 car il existe un surrisque
Après un DG, le risque de DT2 est multiplié par 7. Moins de 5 ans après un DG, le risque de DT2 est multiplié par 4,7 ; au-delà, il est multiplié par 9,31.
Le surrisque est précoce, dès le post-partum, et prolongé
Le DT2 peut être présent dès les premières semaines après l’accouchement2 :
– entre 1 et 6 mois après, la prévalence du DT2 est comprise entre 1,3 et 14 % ;
– celle de l’intolérance au glucose (IGT), entre 7 et 29 % ;
– celle de l’hyperglycémie modérée à jeun (HMJ), entre 3 et 6 %.
Des anomalies si précoces évoquent des troubles préexistants et méconnus, observés plus souvent chez l’obèse.
Rappel des définitions
Diabète : GAJ ≥ 1,26 g/l et/ou G postcharge > 2 g/l ; HbA1c ≥ 6,5 %
Intolérance au glucose (IGT) : G 2e heure postcharge ≥ 1,40 g/l et < 2 g/l
Hyperglycémie modérée à jeun (HMJ) : GAJ ≥ 1,10 g/l et < 1,26 g/l
Le surrisque se prolonge au moins jusque 28 ans plus tard3. Rien ne permet d’envisager la disparition du risque, car le vieillissement, à lui seul, l’augmente. On a pu calculer que 10 à 31 % des patientes DT2 ayant accouché au moins une fois dans leur vie ont présenté un DG.
Un antécédent de DG multiplie aussi le risque de syndrome métabolique par 2 à 5 et celui des diverses pathologies cardiovasculaires par environ 1,74.
Après un DG, il faut dépister le DT2 dès le post-partum puis répéter ce dépistage
Comment ?
Comment dépister ?
- Dès la consultation postnatale
HGPO (75 g, 2 heures)
En cas de refus : glycémie veineuse à jeun (peu sensible)
- Ultérieurement
Glycémie veineuse à jeun
Peut-être HbA1c (non encore validé à ce jour en France)
- Dès la consultation postnatale, par l’hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) ou la GAJ veineuse. La GAJ est bien acceptée mais manque de sensibilité : elle ignore environ 1 DT2 sur 2 ou 3. L’allaitement ou la contraception ne perturbent pas le diagnostic et ne doivent pas le retarder.
- Ultérieurement, ces dosages pourraient être remplacés par celui de l’HbA1c, déjà recommandée par les sociétés savantes étrangères5 car moins variable, plus simple et mieux accepté. La précision des glycémies capillaires est insuffisante.
Chez qui ?
Certains facteurs sont associés à un risque ultérieur plus élevé. Avoir ≥ 2 de ces risques pourrait identifier une population prioritaire pour le dépistage4,6-7, où il pourrait être répété plus souvent. Il faut renouveler le dépistage en cas de souhait de nouvelle grossesse.
Il n’est pas nécessaire de rechercher systématiquement le DT1, sauf dans de rares situations cliniques évocatrices (poids normal, absence d’antécédents familiaux de DT2 mais présence d’antécédents de maladie auto-immune et insulinothérapie lors du DG), par dosage des anticorps anti-GAD.
Pendant combien de temps ?
Le surrisque est prolongé, au moins pendant 25 ans.
Non seulement dépister, mais aussi prévenir le DT2
Pour toutes
- Poursuivre au-delà de la grossesse l’alimentation équilibrée et l’activité physique (30-60 min/j, au moins 5 j/semaine), arrêt du tabagisme ;
- rechercher régulièrement hypertension et dyslipidémie ;
- évaluer le statut glycémique tous les 3 ans, plus précocement si prise de poids.
Cas particuliers
- Si facteurs de risque de DT2 : suivi annuel et éducation thérapeutique (ETP) : modifications du mode de vie.
- Si troubles mineurs de la glycorégulation déjà présents et surcharge pondérale :
programmes d’ETP ciblés car les mesures hygiéno-diététiques sont très efficaces pour prévenir le DT28 ;
la metformine diminue par 2 le risque de DT28 mais elle n’a pas d’AMM dans cette indication en France.
- Si DT2 : ETP du DT2 (surveillance de la qualité de l’équilibre glycémique, objectifs et conduite du traitement et prévention des complications de micro- et macroangiopathie, essentiels à ce stade précoce de la maladie) ; mesures hygiéno-diététiques et thérapeutiques.
Programmation des grossesses ultérieures
Chez les femmes dont la tolérance glycémique est normale, l’enjeu est d’essayer d’empêcher la récurrence du DG ; la perte de poids (5 à 10 kg) réduit le risque.
La conception en hyperglycémie augmente les risques de malformations et de fausse-couche. Il faut donc éduquer à la programmation des grossesses ultérieures en cas de DT2 et vérifier la normalité des glycémies chez toutes.
Le défi ultime reste donc la mise en place non seulement d’une bonne organisation, mais aussi d’une bonne communication entre tous : médecins traitants, gynécologues, obstétriciens, sages-femmes, endocrinologues, équipes de PMI, centres de planification.
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