Glycémie
Publié le 25 juin 2024Lecture 9 min
FreeStyle Libre à travers les âges : quelles innovations à venir ?
L’autosurveillance glycémique en continu au moyen du dispositif FreeStyle Libre (FSL) contribue significativement à l’amélioration du contrôle glycémique tant sur le niveau d’HbA1c et le temps passé dans la cible (TIR) que sur le temps passé en hypoglycémie. Son intérêt est démontré chez les patients diabétiques de type 1 (DT1) et de type 2 (DT2), insulino traités ou non. L’utilisation de FSL réduit la fréquence des hospitalisations pour complications aiguës métaboliques et représente une aide précieuse chez les sujets âgés. La disponibilité d’une mesure continue de la cétonémie pourra apporter un bénéfice complémentaire pour repérer précocement le défaut d’insuline, notamment chez les patients traités par pompe.
Apport de FSL dans le diabète de type 1 de l’enfance à l’âge adulte
Selon une méta-analyse regroupant 75 études, l’utilisation du dispositif FSL entraîne une réduction d’environ 0,5 % de l’HbA1c en moyenne chez les patients DT1 ou DT2(1). Ce bénéfice est rapidement observé et persiste au long cours chez les adultes ; chez l’enfant, la réduction de l’HbA1c peut sembler moindre en raison de sa valeur initiale plus élevée. Le gain observé sur l’HbA1c s’accompagne d’une amélioration des autres index (temps dans la cible, TIR ; temps passé en hypoglycémie, TBR). L’étude RELIEF a montré une diminution des hospitalisations pour acidose de 56,2 %, quelle que soit la fréquence des contrôles glycémiques réalisés avant l’introduction du FSL(2).
Le dispositif FSL sera également capable de mesurer en continu le glucose et la cétone chaque minute durant 15 jours et de transmettre ses valeurs à l’application permettant d’afficher l’évolution de ces 2 marqueurs. À noter que l’élévation des cétones intervient avant celle du glucose. Le pourcentage d’erreurs est faible, quel que soit le niveau d’acétone(3). La détection immédiate de la cétonémie permettra aux patients sous pompe ou boucle fermée de réagir rapidement en cas d’obstruction de cathéter pour éviter une hyperglycémie(4).
Apport de MCG associée à un stylo à insuline connecté
Le stylo connecté permet de garder la mémoire des doses injectées ; les données sont déchargées sur ordinateur ou smartphone. Chez les enfants, les données peuvent être transmises aux parents. Ce système permet de visualiser la mesure continue du glucose (MCG) et les doses d’insuline injectées. C’est un outil qui donne du sens à l’éducation thérapeutique, et facilite l’adaptation des doses d’insuline par le patient et l’équipe soignante et lors de la pratique sportive.
Depuis 2017, date de la mise disposition de FSL, 1er dispositif de MCG pris en charge dès l’âge de 4 ans, sans critère métabolique de prescription, le système évolue. En 2021, une 2e génération est née, FSL2, avec l’ajout d’alarmes optionnelles paramétrables. En 2023, la mise à jour de l’application FreeStyle LibreLink a permis l’obtention des données en continu sans scan sur le téléphone. En 2024, la dernière innovation est le FSL3, le plus petit capteur au monde, qui pourra être couplé à la pompe mylife YpsoPump/ mylife CamAPS FX, pour la boucle fermée hybride, utilisable chez l’enfant à partir de 4 ans. La nouvelle génération « FSL2 Plus » se caractérise par une durée d’utilisation étendue à 15 jours, soit 24 capteurs/an ; elle est approuvée dès l’âge de 2 ans. Ce système est conçu pour être interopérable avec les pompes à insuline, notamment Omnipod 5, et les stylos à insuline connectés.
FreeStyle Libre arrive dans la boucle fermée
Le dispositif FSL3 arrive dans la boucle fermée (BF), couplé avec le système CamAPS FX et la pompe mylife YpsoPump, ce qui permettra avec cette pompe de choisir le capteur. Le FSL 3 permet une mesure continue du glucose en temps réel chaque minute. Sa fiabilité est inégalée : MARD à 7,8 % durant 14 jours, sans calibration. Les données de 14 jours sont stockées dans le capteur, même en cas de perte de signal, pour une analyse complète du profil glycémique, soit 100 % du profil de glucose et non les 8 heures de mémoire flottante que l’on connaissait jusqu’ici. Les alarmes sont optionnelles. Le dispositif permet d’apprécier l’engagement du patient grâce à l’indicateur de nombre de « vues ». Le capteur est encore plus petit ; son applicateur est intégré, donc plus facile à poser. Il est aussi plus respectueux de l’environnement. L’application CamAPS FX ne change pas. La mise en route est simple : après avoir appliqué un nouveau capteur, il faut le scanner et attendre seulement 60 minutes pour que le système soit opérationnel en boucle fermée.
Des données en vraie vie sont disponibles venant d’Allemagne où le système est déjà disponible(5). Cette première étude a été réalisée sur une population de 100 patients DT1, comprenant majoritairement des adultes mais aussi des enfants et des sujets âgés (âge moyen 35 ans). Sur l’ensemble de la cible, le TIR est de 72 % environ (74 % chez les adultes, 67,6 % chez les enfants, 69,6 % chez les petits enfants), avec ≥ 95 % du temps passé en automode (BF). Le système est fonctionnel et obtient des résultats comparables à ce que l’on peut attendre d’une BF. En pratique, la mise en place est facile et le changement de système est rapide, en ambulatoire.
Le dispositif « FSL2 Plus » fonctionnera aussi avec Omnipod5. Ce système est encours d’évaluation dans l’étude GRADIANT qui inclura, dans 17 centres dont 12 centres en France, 200 patients, randomisés Omnipod5 + FSL2 vs multi-injections quotidiennes (MDI) + FSL2 pendant 13 semaines pour une durée de suivide3mois.Un partenariat est également encours de finalisation entre Tandemet FSL.
Parmi plusieurs dispositifs permettant une boucle fermée, le FSL3 est particulièrement attendu, du fait de sa miniaturisation.
FSL2 dans le DT2
Résultats de l’étude RELIEF
Le FSL2 est remboursé dans le DT2 chez les patients traités par insulinothérapie optimisée en basal-bolus depuis le 1er juin 2017, et chez les patients DT2 traités par une basale seule avec HbA1c ≤ 8 % depuis juin 2023. Les patients traités par voie orale ne sont pas remboursés. L’extension du remboursement dans le DT2 a été obtenue grâce à l’étude RELIEF, basée sur les données exhaustives de la sécurité sociale. Les données d’hospitalisation pour événements liés au diabète (acidocétose, hypoglycémie, coma) ont été comparées chez les patients ayant eu accès au FSL depuis août 2017 jusqu’en décembre 2018, versus l’année précédant le FSL. On a pu identifier 31 446 DT1 et 41 027 DT2.
La première étude a montré une diminution de moitié des événements liés au diabète à 1 an(6) ; la deuxième montre un gain pérenne à 2 ans(7). D’autres sous-populations ont été étudiées, notamment 1 900 patients non traités par insuline, équipés d’un FSL non remboursé.
Chez les patients DT2 sous insulinothérapie optimisée, à 1 an, on voit une diminution de 52 % des acidocétoses et une diminution plus modérée des hypoglycémies, gain pérenne à 2 ans.
RELIEF Basale
Chez les patients traités par insuline basale (± autres antidiabétiques), soit 5 933 patients, on a observé une réduction à 1 an de 75 % des épisodes d’acidocétose, de 44 % des hypoglycémies et de 71 % des comas (soit une baisse de 67 % des événements aigus liés au diabète) et de 7 % de toutes les causes d’hospitalisation liées au diabète. À 2 ans, le bénéfice se majore : -43 % d’acidocétose vs 1re année, réduction des hypoglycémies, des comas et des hyperglycémies ; l’ensemble des événements liés au diabète diminue aussi. Ces résultats sont observés que la prescription ait été initiée en médecine générale ou en soins spécialisés. Les traitements du diabète ont évolué après l’introduction du FSL : au bout d’1 an seulement 65 % des patients étaient traités par insuline basale seule ; à l’inverse, 22,1 % ont initié une multi-injection et 6,2 % ont arrêté l’insuline basale. Cette évolution perdure à 2 ans : le pourcentage de patients sous basale seule continue de diminuer alors que les multi-injections augmentent de même que les arrêts de l’insuline. Il semble donc que l’utilisation du FSL induit des modifications tant comportementales que dans l’intensification du traitement.
Chez les sujets > 65 ans
L’étude RELIEF comptait 14 147 patients DT2 âgés de > 65 ans sous insulinothérapie intensifiée en 2017 (24 165 en 2018). L’utilisation du dispositif FSL a permis une diminution importante et persistante des événements aigus liés au diabète dans toutes les tranches d’âge : -34 % et -40 % à 1/2 ans ; -54 % et -31 % d’acidocétoses à 1/2 ans ; -15 % et -43 % d’hypoglycémies à 1/2 ans. La persistance de l’utilisation du FSL est de 91 % et 90 % à 1/2 ans. L’ensemble de ces résultats plaide pour l’utilisation de la MCG dans cette population afin de personnaliser le traitement.
FreeStyle Libre 2 chez les sujets âgés
Un quart des patients vivant avec un diabète ont plus de 75 ans. Cette population est hétérogène et présente des risques spécifiques ; les hypoglycémies sont souvent méconnues, sous-estimées et de mauvais pronostic. Ainsi une méta-analyse de 44 études chez plus de 2,5 millions de patients a montré que les hypoglycémies sont associées à une augmentation du risque de mortalité (x 2,02), de mortalité cardiovasculaire (x 2,11), de toutes les autres complications du diabète et des chutes et fractures(8,9).
Selon la prise de position de la SFD mise à jour en 2023, les cibles de MCG chez le sujet âgé sont : TIR > 50 % dans la cible ; TAR < 50 % à > 180 mg/dL et < 10 % à > 250 mg/dL ; TBR < 1 % à < 70 mg/dL et 0 % à < 54 mg/dL(10). La mesure du glucose interstitiel en complément d’une autosurveillance glycémique est aujourd’hui prise en charge chez les patients DT2 traités par insulinothérapie non intensifiée (< 3/j) dont l’équilibre glycémique est insuffisant (HbA1c ≥ 8 %), ce qui est souvent le cas chez les diabétiques âgés.
L’étude HYPOAGE avait pour objectif de déterminer la fréquence et les facteurs associés aux hypoglycémies chez 155 patients diabétiques de type 2 âgés de ≥ 75 ans (≈ 81 ans, HbA1c 7,9 %) insulino traités(11). Sur une période de suivi de 28 jours, au moins une glycémie capillaire < 70 mg/dL a été notée chez 37,6 % des patients, symptomatique chez seulement 12,8 % des patients. Sur 6 hypoglycémies sévères, 2 ont conduit à l’hospitalisation. Ces hypoglycémies sont survenues plus fréquemment chez les sujets âgés en bonne santé que chez les sujets ayant des comorbidités (51,3 vs 32,4 %, p = 0,04) ; 65,2 % des patients ont présenté sur la MCG des périodes d’hypoglycémie nocturne (< 54 mg/dL) durant > 15 min. Les facteurs prédictifs d’hypoglycémie confirmée sont l’ancienneté du diabète et la variabilité glycémique ; pour les hypoglycémies sévères, ce sont les troubles cognitifs et l’insuffisance cardiaque alors que le risque de dépression est plutôt un facteur protecteur.
Une deuxième étude française a été réalisée dans 6 établissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes(12). L’étude EHPAD a évalué 42 patients vulnérables (87,4 ans en moyenne ; HbA1c 7,7 %),t raités par sulfamides ou glinides (55 %) ± insuline (76 %), surveillés par FSL Pro pendant 14 jours. Au total 242 épisodes d’hypoglycémie ont été identifiés chez 33 patients (79 %), comparativement à 5 hypoglycémies chez 4 patients sur glycémie capillaire ; 17 % des patients ont passé > 20 % de la journée en hypoglycémie et 17 % > 25 % de la nuit en hypoglycémie. Une hypoglycémie a été détectée chez 100 % des patients avec une HbA1c < 7 % et chez 79 % des patients avec HbA1c ≥ 8 %. Le temps passé en hypoglycémie était 4,5 fois plus important pendant la nuit versus le jour et 45 % de ces patients ont eu des glycémies < 0,54 mg/dL.
La mesure continue du glucose est une aide précieuse pour repérer les hypoglycémies chez le sujet âgé et adapter le traitement. Elle est utilisable quel que soit le degré d’autonomie du patient.
FSL dans le DT2 non insulinotraité
L’étude IMMEDIATE a été réalisée chez 116 patients DT2 (âge < 60 ans, durée du diabète 9-10 ans, HbA1c 8,5- 8,7 %, TIR 56-57 %), traités par ≥ 1 ADO (2,6 en moyenne)(13). Ces patients ont été randomisés en deux groupes : FSL + éducation vs glycémies capillaires + éducation, et suivis pendant 7 semaines. Les résultats à 16 semaines montrent une amélioration de l’équilibre du diabète chez les patients équipés d’un FSL comparativement à l’ASG : TIR -9,9 % (76 % vs 65 %) ; TTIR (70-140 mg/dL) -8,5 % (50 % vs 40 %) ; TAR + 8,1 % (21 % vs 30 %) ; sans augmentation du TBR. Le traitement a été majoré chez < 10 % des patients. La mesure continue du glucose a probablement amélioré la compréhension du diabète.
La MCG associée à l’éducation chez les personnes vivant avec un DT2 traité par ADO/GLP-1 RA a un impact favorable sur l’équilibre glycémique sans modification importante du traitement médicamenteux.
D’après un symposium Abbott avec la participation de H. Hanaire, E. Cosson, É. Renard, É. Bismuth, M. Joubert, B. Guerci et J.-P. Riveline, SFD 2024
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