Congrès
Publié le 30 sep 2012Lecture 5 min
Une nouvelle insuline ultra-longue, degludec
ADA
La recherche de nouvelles insulines répond à plusieurs objectifs, le premier étant de diminuer l’HbA1c sans augmenter le risque d’hypoglycémie, qui constitue un frein puissant à l’adhésion du patient à l’insulinothérapie et représente un pourcentage important des hospitalisations pour effets iatrogènes des traitements ; l’objectif est aussi de limiter la prise de poids. En améliorant la sécurité d’emploi de l’insulinothérapie et la qualité de vie des patients, ces derniers devraient pouvoir tirer les meilleurs bénéfices de ce traitement.
Un pas vient d’être franchi avec la mise au point d’une nouvelle insuline basale, d’action ultra-longue (demi-vie > 24 h), degludec (non encore commercialisée), qui forme des multi-hexamères solubles après injection sous-cutanée et libère progressivement les monomères, d’où une absorption lente et continue avec un profil d’action plat et stable sur 24 heures (Heise T. et al. 349-OR), permettant de minimiser les variations de la glycémie.
Moins d’hypoglycémies nocturnes
L’insuline degludec fait l’objet d’un vaste programme de développement. Deux études de phase 3 réalisées chez des diabétiques de type 2 et de type 1 ont déjà été publiées (Lancet 2012 ; 379 : 1498-507 et 1489-97). Ces deux études du programme BEGIN™ ont comparé l’administration quotidienne des analogues de l’insuline degludec et glargine en schéma basal-bolus, en titrant chacune de ces insulines basales pour atteindre une cible d’HbA1c de 7 % environ. Chez les diabétiques de type 2, il a été observé une petite différence non significative sur la glycémie à jeun en faveur de degludec et un taux significativement plus faible d’hypoglycémies (11,1 vs 13,6 épisodes/an/patient), principalement nocturnes, chez les patients traités par degludec comparativement à la glargine qui, elle-même, présente déjà 20 à 30 % de risque en moins comparativement à l’insuline NPH. Ce bénéfice en termes de risque d’hypoglycémie est d’autant plus important, selon le Dr C. Mathieu (Leuwen, Belgique), qu’il faut mettre en confiance un diabétique qui débute une insulinothérapie.
Dans l’étude réalisée chez les diabétiques de type 1, le moindre risque d’hypoglycémies nocturnes est retrouvé sous degludec (25 % de moins), alors qu’il n’y a pas de différence entre les deux insulines basales sur les hypoglycémies confirmées (< 3,1 mmol/l) et les hypoglycémies sévères.
Les données des études ayant évalué l’insuline degludec réalisées chez des diabétiques de type 1 et 2 ont été rassemblées dans le cadre d’une métaanalyse, qui confirme la réduction du risque d’hypoglycémie nocturne (Ratner RE. et al. 387P). Chez les malades traités par un schéma basal-bolus, le bénéfice de degludec sur les hypoglycémies diurnes est gommé en raison de l’utilisation des insulines rapides.
Les irrégularités dans l’administration de l’insulinothérapie basale sont corrélées aux hypoglycémies.
En montrant qu’un diabétique de type 2 sur 4 a oublié de faire son injection d’insuline ou a fait une erreur de dosage, l’enquête GAPP2™ (Global Attitudes of Patients and Physicians) est parfaitement révélatrice des aléas de l’insulinothérapie basale. Cette enquête, rapportée en late breaking trial au congrès de l’ADA (M. Brod et al. 27-LB) a été réalisée auprès de 3 034 patients diabétiques de type 2 et 1 653 personnels soignants, dans 6 pays (États-Unis, Canada, Japon, Allemagne, Royaume-Uni et Danemark).
Durant le mois précédant l’enquête, 22 % des malades interrogés ont oublié une injection d’insuline (en moyenne 3 fois), 24 % l’ont faite plus de 2 heures passé l’horaire prévu (au moins 4 fois) et 14 % ont diminué la dose d’insuline basale (au moins 4 fois). Ces irrégularités ne sont pas sans conséquences : les patients qui oublient de faire leurs injections de basale rapportent plus souvent des hypoglycémies. Dans l’ensemble, 36 % des patients interrogés ont souffert d’hypoglycémie dans le mois précédent, dont le quart durant la période nocturne. Ces hypoglycémies nocturnes sont considérées plus inquiétantes que celles survenant pendant la journée.
Davantage de flexibilité
Une étude de flexibilité a été réalisée afin d’évaluer l’impact d’une injection quotidienne d’insuline dégludec à différents moments de la journée (étude 3770b BEGIN Flex). Cette flexibilité forcée des injections d’insuline degludec donne d’aussi bons résultats sur le contrôle glycémique que les injections à heures fixes de degludec, et le risque moindre d’hypoglycémies nocturnes est confirmé. On voit ici tout l’avantage d’une insuline ultra-longue qui permet d’adapter les horaires des injections aux contraintes de vie, et chez les patients ayant tendance à oublier leurs injections.
À l’avenir, il sera nécessaire de définir de nouveaux schémas d’administration permettant d’adapter les bolus en fonction des caractéristiques pharmacodynamiques de la basale degludec, selon C. Mathieu. Les besoins d’insuline de rattrapage seront probablement moindres. Par ailleurs, les taux plasmatiques d’insuline atteignent un plateau au bout de 3 jours et il n’y a pas de risque d’accumulation, même si une deuxième dose est administrée 8 heures après la précédente. En pratique, il faut attendre 3 à 4 jours pour parvenir au steady-state (Heise T. et al. 1013-P).
Une prise de poids modérée
On savait déjà que la prise de poids sous insuline basale diffère selon les analogues. Elle serait moindre avec la detemir, l’hypothèse formulée étant que cette dernière a un moindre effet orexigène. Les molécules de Levemir® et de degludec sont toutefois différentes et il est postulé que la Levemir® pénètre davantage dans le cerveau que l’insuline degludec. Ceci expliquerait l’absence de différence de prise de poids entre les deux basales, glargine et degludec. Toutefois, le gain de poids moyen dans les études de phase 3 de degludec est de l’ordre de 0 à 1,5 kg, ce qui est modeste.
L’insuline degludec pourrait représenter un progrès dans l’insulinothérapie basale, grâce à la réduction des hypoglycémies et à la flexibilité envisageable sur les horaires d’injection quotidienne, ce qui permettrait d’amener davantage de patients à la cible d’HbA1c et de faciliter la titration de l’insuline. À plus long terme, d’autres nouveautés se dessinent : insulines orales, insulines hépatospécifiques permettant de dissocier l’effet hypoglycémiant de l’effet anabolisant, insulines sensibles au glucose (libérées spécifiquement en fonction des besoins)… et, sans doute à plus court terme, insulines ultrarapides qui devraient faciliter le traitement par pompe à insuline.
Conférence de presse Novo Nordisk avec la participation de K. Jensen, interview de C. Mathieu (Leuwen, Belgique).
72e sessions scientifiques de l’American Diabetes Association (ADA), 8-12 juin 2012, Philadelphie, États-Unis.
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